Et voilà que dans la couleur, tu évolues vers le monochrome…
Est ce une nouvelle étape ?
Ah, le monochrome?
Une étape? je ne dirais pas cela comme çà. je dirait
une tentation?
une impasse?
un défi?
un rêve?
un désir immense?
Cela me donne l’occasion de répondre à « pour qui peindre? »
Si j’étais seul au monde, je veux dire sans « autre », je ne peindrait que des monochromes.
Le monochrome est cet océan de bleu, ou de turquoise ou de rouge ou de blanc peu importe la couleur car je les aimes toutes.
le monochrome c’est l’infini à la portée de l’humain.
c’est l’unité
c’est une perfection.
la tentation de ne peindre que des monochromes est forte, mais j’ai peur du regard de l’autre qui pense que c’est du « foutage de gueule »
Mais au fait, pour qui je peins?
- pour moi, pour éprouver une jouissance rhéologique et visuelle à étaler une couleur uniformément sur une énorme toile blanche?
- pour l’autre qui me juge et qui va ou non, acheter l’oeuvre et donc, me donner la gratification que j’attends?
- pour les deux mon général?
une impasse car effectivement, que peindre après le monochrome? J’en ai fait l’expérience: après avoir peint mon dernier monochrome de 1,80 par 1,80 qui n’était pas vraiment un vrai monochrome, plutôt un camaïeux de beiges, cela a été ce que j’appelle « une interruption momentanée du programme. » Bridé que j’étais pas des croyances personnelles.
reprise des travaux en 2015: la traversée du monochrome. J’ai couvert cette même toile d’un jaune d’or et ai peint dessus le thème biblique de l’Arche d’Alliance.
suivi par une série de toiles à fond monochrome sur lequel une écriture personnelle a cherché forme.
« une lumière diffuse demande sa forme au néant » philosophie taoïste
« les hommes cherchent la lumière dans un jardin fragile où foisonnent les couleurs » Jean Tardieu
un defi. Considérant le monochrome comme la plus radicale élimination du sujet, j’aime cette réflexion de Motherwell: « il y a dans toute oeuvre un double aspect: un côté formel ou structurel et un côté littéraire ou lié au sujet. C’est en supprimant le second que l’on a le plus de chance de voir apparaître le premier, en mettant au jour une langue abstraite, universelle. »
un désir immense. Mi 2019 j’achète 7 grands châssis entoilés de la plus belle toile de lin.
Je les peins chacun aux 7 couleurs de l’arc-en-ciel.
Je passe plusieurs semaine à me laisser baigner par leur lumière respective.
La tentation est forte à nouveau de les exposer tels quels.
la même question revient
« pourquoi peindre? » mais cette fois non pas « pourquoi peindre plutôt que ne pas peindre », non, j’ai déjà répondu à cette question à savoir « parce que je suis un peintre et que l’art est un processus qui existe depuis la nuit des temps et donc je participe à ce processus et de ce processus parce que je suis peintre »
mais « pourquoi peindre des monochromes » et la réponse est:
« je ne sais pas» « je suis, je peins et basta! »
Résultat des courses, j’ai recouvert 6 de ces magnifiques monochromes de taches tombées du ciel et cela fait de très beaux tableaux.
Je vais voir ce que je ferai du 7ème, et je me dis qu’un jour peut-être lorsque j’aurai reçu l’onction du public, je ne peindrai que des monochrome. 🙂